écologue
Noelline Tsafack
Écologie et écotoxicologie de Orius sp. (MCF Avignon)

Écologie et écotoxicologie de Orius sp. (MCF Avignon)

Projet proposé dans le cadre d’une candidature à Avignon dans l’UMR IMBE équipe BES.

Écologie et écotoxicologie d’un prédateur généraliste : La punaise anthocoridé Orius sp.

IV.2.1. Contexte

La production de pommes constitue une culture importante économiquement en particulier dans la région Sud-Est. En effet, la région produit les 25% de pommes récoltées en France (1,67 million de tonnes)1. L’étude de l’entomofaune (ravageurs et auxiliaires) des vergers permet d’optimiser la production tout en modérant l’apport d’intrants chimiques. Dans un contexte de changement climatique où l’équilibre des processus écologiques comme les services écosystémiques est menacé, la dynamique des communautés des auxiliaires de culture ressort comme un sujet de recherche primordial.

Ce projet s’intéresse à l’écologie et à l’écotoxicologie d’un groupe d’auxiliaires du verger : les punaises anthocoridés Orius sp. Les punaises anthocoridés sont des prédateurs généralistes, présentes dans plusieurs systèmes de culture dont les vergers. Dans les vergers, les punaises anthocoridés (larves et adultes) sont prédatrices de pucerons et d’autres ravageurs. Le potentiel de prédation de ces généralistes est encore peu étudié. De plus, les effets des pesticides sur ces auxiliaires ne sont pas connus.

L’équipe BES a déjà réalisé des études similaires sur d’autres auxiliaires de culture notamment sur les forficules, mon projet les continuera et les complétera. J’ai toutes les compétences nécessaires pour mener à bien ce projet et pourrait également m’appuyer sur les compétences de l’équipe en support.

IV.2.2. Objectifs scientifiques

Ce projet s’intéresse à l’écologie et à l’écotoxicologie d’un groupe d’auxiliaires du verger : les punaises anthocoridés Orius sp. Il s’agit d’une part de développer des connaissances autour des mécanismes (pratiques agricoles, changement globaux) qui expliquent la distribution et l’abondance des communautés d’anthocoridés et parallèlement mener des expérimentations au laboratoire sur les effets des produits phytosanitaires.

Il s’agira notamment de développer les points suivants :

  • Au laboratoire : Nous étudierons les effets des pesticides les plus courants sur les anthocoridés par des mesures associées aux traits biologiques (production d’œufs, succès de l’éclosion, potentiel de prédation…).
  • Sur le terrain : Nous étudierons comment différents facteurs influencent les communautés des anthocoridés.
    • Facteurs locaux (microclimat, sol, pratiques agricoles)
    • Facteurs globaux (gradient de température, humidité)
    • Facteurs paysagers (composition, cultures attenantes, fragmentation, habitats potentiels)
  • Modélisation 1 : Nous modéliserons les effets propres et conjugués des facteurs locaux (comme les pratiques agricoles) et des facteurs paysagers en utilisant par exemple les modèles SEM (Structural Equation Modeling). Nous tenterons ainsi de comprendre les interactions entre les effets du paysage et les effets des pratiques agricoles.
  • Modélisation 2 : Nous modéliserons de façon poussée les effets du changement climatique en utilisant l’algorithme MaxEnt. Nous considérons d’une part l’enveloppe climatique de la proie (puceron), d’autre part l’enveloppe climatique de l’espèce Anthocoridae dominante (prédateur). En recoupant les deux enveloppes, nous pourrons prédire avec plus de précision la réponse du service de régulation face au changement climatique.

IV.2.3. Méthodes

  • Sites d’étude

Pour coordonner ce projet avec les activités de l’équipe les sites d’études seront sélectionnés sur les vergers de la région déjà utilisés par l’équipe.

  • Echantillonnages

Des enquêtes seront réalisées auprès des exploitants pour collecter des données sur les pratiques agricoles dont l’IFT.

Les données sur les pucerons seront collectées (comptage) et les pièges collants utilisées pour collecter les anthocoridés.

  • Données du paysage

Les éléments du paysage seront relevés. Il s’agira notamment des différents types d’occupation du sol. Ces données seront complétées par les données des images satellite. Ensuite, j’utiliserai les outils d’analyses spatiales QGIS (ou ArcGIS) pour caractériser l’organisation spatiale à différentes échelles.

  • Analyse au laboratoire

Au laboratoire, des études seront réalisées pour l’élevage de Orius. Sp (espèce à déterminer), les analyses biochimiques pour détecter et quantifier les polluants sur les insectes et sur la végétation, et l’identification des espèces piégées.

  • Méthodes statistiques

En plus de SEM et MaxEnt présentés plus haut, j’utiliserai des outils statistiques que j’ai déjà utilisé avec succès dans mes projets précédents. Il s’agira par exemple de techniques d’analyses multivariées comme l’analyse canonique des correspondances (CCA), des modèles linéaires généraux (GLM, GLMM), des modèles des moindres carrés partiels (PLS) dans les situations où nous aurons plus de prédicteurs que d’observations, des modèles de filtrage spatial des vecteurs propres (ESF) pour s’affranchir des problèmes d’autocorrélation spatiale pendant l’analyse des effets des facteurs paysagers si jamais pour des questions de logistique les sites d’échantillonnages étaient spatialement dépendants.

Par ailleurs j’aimerai explorer des modèles novateurs : Machines à vecteur de support, arbres de décision, forêts aléatoires2,3.

IV.2.4. Dimensionnement – faisabilité

Au vu de mon expérience en protocole de terrain et en valorisation de données, j’estime que pour avoir des données intéressantes statistiquement (significatives) il faudra avoir une trentaine de points d’échantillonnages, avec des relevés tous les mois du printemps au début de l’automne. La prolongation du projet sur plusieurs années permettrait d’avoir des données très intéressantes sur l’évolution dans le temps des différentes dynamiques prédateur/proie. Le travail de terrain demandera l’aide d’au moins une personne (travail en binôme). Les modalités de l’élevage seront à déterminer.

Au total, ce projet demandera peu de ressources pour de résultats scientifiques intéressants et novateurs. Il n’y a pas de difficultés matérielles ou méthodologiques majeures.

IV.2.5. Apports du projet

Ce projet complétera les résultats déjà obtenus par l’équipe et sera l’un des premiers à produire des résultats (articles dans des revues à comité de lecture internationales) sur les facteurs influençant la dynamique et le potentiel de prédation des punaises dans les vergers. Ainsi, il permettra de formuler des recommandations plus précises sur l’utilisation de ces régulateurs biologiques et sur la modulation des pratiques agricoles suivant le paysage.

Ce projet apportera également des résultats théoriques de portée plus générale d’une part sur les réponses des systèmes prédateur/proie au changement climatique et d’autre part sur la discrimination entre les effets du paysage et les effets des pratiques agricoles sur les communautés d’auxiliaires.

Le projet s’inscrit donc très bien dans les travaux de l’équipe BES, et apportera à la fois des résultats scientifiques novateurs sur ces questions encore globalement peu étudiées, et des applications pratiques assez directes, ce qui sera d’ailleurs un plus pour la recherche de financements.

IV.2.6. Intégration au laboratoire

Les sites d’étude déjà utilisés par l’équipe seront privilégiés. Je pourrai bénéficier des méthodologies et des compétences de l’équipe, ainsi que du matériel de laboratoire existant.

Au fil du projet, les compétences de l’équipe pourront m’être utiles en soutien.

1 https://www.planetoscope.com/fruits-legumes/391-production-de-pommes-en-france.html

2Fox et al, 2018. doi : 10.1007/s10661-017-6025-0

3Breiman 2001. doi: 10.1023/A:1010933404324